Une barrière verte et mobile pour intercepter les déchets du Canal
Tous les jours, de nombreux déchets flottent à la surface du Canal de Bruxelles. S’ils ne sont pas repêchés, ces déchets terminent leur course dans la mer, via l’Escaut. Ils font partie des 8 millions de tonnes de déchets qui finissent chaque année dans les océans, dont une majeure partie depuis les canaux et les rivières. Il s’agit d’un problème environnemental de grande ampleur, menaçant toutes les formes de vie. Depuis la création de Canal It Up, nous travaillons sur des solutions concrètes pour stopper ces flux de déchets depuis les villes. Nous avons ainsi développé en 2020 une barrière à déchets pour le Canal, verte et mobile, afin d’interrompre leur pollution avant qu’ils ne quittent Bruxelles.
Bien sûr, il serait préférable d’arrêter la pollution « à la source », avant que les déchets ne finissent dans l’eau. Pour cette raison, nous nous sommes rendus au Parlement bruxellois et au Parlement flamand. Pour limiter les déchets sauvages nous avons demandé l’introduction en Belgique d’une consigne sur les canettes et les bouteilles en plastique et l’usage généralisé d’emballages réutilisables. Également pour limiter le transport accidentel des déchets par les cours d’eau, nous proposons d’installer une plinthe en bas des garde-corps le long des quais du Canal, évitant ainsi la « chute » des déchets par le vent. Comme la prolongation de l’état de propreté de nos villes, un Canal impropre est le reflet d’une ville avec des déchets sauvages. Notre modèle de consommation doit être alors drastiquement reconverti vers une consommation circulaire avec moins d’emballages jetables. Mais lorsque nous allons au supermarché aujourd’hui, nous en sommes encore submergés. Force est de constater qu’actuellement les déchets ne finiront pas de se retrouver dans les cours d’eau et que nous avons besoin de solutions efficaces pour les arrêter.
Beaucoup d’actions sont déjà menées par le Port de Bruxelles pour nettoyer les déchets de l’eau (nettoyage des bateaux, litter trap) mais le problème est trop vaste et récurrent pour y remédier avec ces moyens. Le Canal étant avant tout une voie navigable pour le transport de marchandises par bateau, les solutions envisageables s’amenuisent. Comment arrêter le flux de déchets sans perturber la circulation des bateaux ? A la porte de Ninove, l’Ecluse de Molenbeek est un point d’arrêt pour chaque bateau traversant Bruxelles. Pourquoi ne pas installer une barrière devant les portes de l’écluse, permettant d’arrêter l’intégralité des déchets ?
Regardez la vidéo pour voir comment la barrière fonctionnerait.
Nous avons développé cette idée sous ses aspects techniques et économiques et l’avons présentée au Port de Bruxelles ainsi qu’à la Région. La barrière, constituée de tubes flottants robustes est placée en diagonale, sur toute la largeur du canal. Grâce au faible courant présent, les déchets sont acheminés naturellement vers la barrière. Depuis ce point, ils sont de la même façon, redirigés vers le quai où ils sont récoltés dans un piège à déchets. Une fois que les déchets se retrouvent dans le piège, ils ne peuvent plus en sortir, et cela même avec les changements de direction du vent . Le piège à déchets peut être vidé depuis le quai par un camion avec une grue ou manuellement au moyen de filets de pêche. Les déchets ne pourraient passer sous la barrière, une grille d’environ 50cm sous la surface de l’eau étant prévue. A gauche, la barrière est fixée au quai via une charnière, à droite, elle est équipée d’un moteur pour l’ouverture et la fermeture. Les éclusiers, qui sont toujours présents, ont une bonne vue sur la barrière, où dès qu’un bateau approche ils peuvent ouvrir la barrière en appuyant sur un bouton et la refermer une fois le bateau passé. Au cas où un problème surviendrait, la barrière est équipée d’un levier pour l’ouvrir manuellement.
Nous voulions aller plus loin que de simplement développer une barrière à déchets. L’installation doit s’inscrire comme un symbole dans le quartier, en le valorisant et en marquant une ère nouvelle. Devenant en quelque sorte, une œuvre d’art à part entière. C’est dans cette optique que nous avons contacté Luc Schuiten, architecte, urbaniste et artiste, pour développer davantage ce concept. C’est ainsi que nous en sommes arrivés à la conception de la barrière verte. Le design de Luc Schuiten est visible tout en haut de cette page. La barrière, constituée d’îles flottantes jonchées de plantes aquatiques devient un élément vivant prenant ses racines dans l’eau d’où elles extraient leurs nutriments. Ce sont les mêmes îles que le projet pilote déjà placé dans le canal par le Port de Bruxelles. Les déchets flottants rencontrent une barrière « naturelle » verte qui arrête les déchets et les force à aller sur le côté. De cette façon, nous donnons symboliquement une voix à la nature qui s’oppose à la pollution de l’eau. C’est un message puissant. Pour augmenter la visibilité de la verdure, des îlots supplémentaires avec des plantes sont ajoutés contre le quai.
Le Port de Bruxelles mène actuellement une étude sur la problématique des déchets flottants dans le Canal. Canal It Up, Bruxelles Environnement et Vivaqua suivent cette étude dans un comité de suivi. Notre proposition de barrière à déchets sera examinée et il sera vérifié si cela est compatible avec le fonctionnement de l’écluse. Cependant, nous ignorons l’échéance de cette étude. Le Port s’est engagé à mettre en œuvre les recommandations de l’étude afin d’arrêter efficacement les flux de déchets.